Intervenir en urgence, alors qu’aucune prescription médicale n’a encore été rédigée, fait partie des situations délicates du quotidien infirmier. Qu’il s’agisse d’une détresse respiratoire à domicile, d’une chute grave ou d’un malaise soudain, le soignant doit décider vite, tout en respectant le cadre légal qui encadre strictement son autonomie.
Selon l’article R.4311-7 du Code de la santé publique, « l’infirmier ou l’infirmière est habilité à pratiquer les actes suivants soit en application d’une prescription médicale qui, sauf urgence, est écrite, qualitative et quantitative, datée et signée ». Autrement dit, hors urgence, tout acte relevant du rôle prescrit doit être autorisé par écrit. Mais la loi prévoit également des marges d’action pour faire face aux situations d’urgence.
Ainsi, l’article R.4311-14 du même code précise que, « en l’absence d’un médecin, l’infirmier ou l’infirmière est habilité à mettre en œuvre les protocoles de soins d’urgence préalablement établis par un médecin responsable ». Et si aucun protocole n’est disponible, « il décide des gestes à pratiquer en attendant que puisse intervenir un médecin ». Cela lui permet d’agir sans prescription écrite, à condition de rester dans ses compétences et d’alerter immédiatement les secours ou un médecin.
Dans la pratique, les prescriptions orales complètent souvent ce cadre. Un médecin peut donner ses instructions par téléphone ou en visio, notamment en cas d’urgence ou en dehors des heures d’ouverture. Ces prescriptions sont juridiquement valables, à condition d’être retranscrites et signées a posteriori. L’infirmier doit alors consigner dans le dossier de soins la date, l’heure, le contenu de la prescription et le nom du prescripteur. Cette traçabilité protège le soignant en cas de litige. Un acte réalisé sur simple demande verbale, sans validation écrite ultérieure, expose le soignant à une mise en cause pour exercice illégal ou faute professionnelle.
Du côté des aides-soignants, leur champ d’action reste limité. L’article R.4311-4 du Code de la santé publique rappelle qu’ils interviennent sous la responsabilité de l’infirmier et uniquement pour des soins relevant de leur qualification. Cependant, en situation d’urgence, l’aide-soignant doit avant tout agir pour préserver la vie comme pratiquer un massage cardiaque, ou mettre la personne en position latérale de sécurité.
Face à l’urgence, le réflexe doit être triple : agir, alerter, tracer. Agir dans la limite de ses compétences, alerter immédiatement un médecin ou un service d’urgence, et tracer par écrit chaque geste et décision. Car si la loi fixe un cadre strict, elle reconnaît aussi le discernement et la réactivité du soignant. C’est cette capacité à évaluer, à décider avec justesse et à documenter ses choix qui incarne, au fond, la responsabilité et la valeur du soin en situation d’urgence.
Clémentine Thieblemont
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